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Antoine

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14 octobre 2006

Merci Antoine et Fabrice

Jeudi 5 octobre, 20h

Je suis depuis quelques minutes l’heureux propriétaire du disque dur externe de 120 Go qui va enfin me permettre télécharger les vidéos qu’adiperno@gmx.net m’envoie tous les quatre jours depuis maintenant onze mois. Deux heures de communication avec les Etats-Unis plus tard, un collègue prix nobel d’informatique et un ami à lui de la Nasa trouvent le moyen d’ouvrir les vidéos en question. Je me régale d’avance, à juste titre : Antoine avec une moustache, Fabrice avec un costume, des hélicoptères, Antoine et Fabrice qui se chamaillent... Je visionne une vingtaine de fois ces vidéos dans de longs éclats de rires et ne résiste pas à l’envie d’appeler Antoine dans la foulée pour le féliciter de ce chouette boulot et m’enquérir du thème de sa soirée. Les séries des années 80 ? Aïe, les festivités sont dans deux jours, et je n’ai rien à mettre, comme diraient Antoine ou Fabrice rentrant bredouilles d’une nuit en discothèque.

Samedi 7 octobre, 9h

Adieu, adieu à toi Paris, plus belle ville du monde, nos amis nous attendent mais je reviendrai, c’est juré. Nos hôtes ont été formels : à deux heures de route du périphérique, grand maximum, le Chatelet et les mille trésors du Berry nous tendent les bras. Neuf heures plus tard, les routes du Cher défilent joyeusement sous les pneu Michelin de la Mégane Scénic pack luxe que nous avons louée à prix d’or. Quel charmant pays. Tout est si verdoyant que c’est à en avoir le tournis. Torchons un ou deux Ricard avant d’aller plus loin mes enfants, et la messe sera dite.

Samedi 7 octobre, 18h

C’est dans un café vibrant d’authenticité - intégralement meublé en essences de formica d’Amazonie - que nous dégustons ce premier verre de la soirée. L’endroit est magnifiquement agrémenté de scène champêtres. Mon œil exercé note immédiatement une pièce rare, merveilleusement encadrée. Un puzzle de 2000 pièces entièrement assemblé à la main, représentant un cerf d’une grande majesté se rafraîchissant dans l’onde sous l’œil malicieux d’un arc en ciel. La chatte ! Comment ça déchire… Mais du haut de ses 91 ans la tenancière des lieux en a vu d’autres, des bourlingueurs comme moi. Elle a toujours bon pied bon œil la vieille, elle m’a vu venir et refuse obstinément de me céder l’oeuvre malgré les liasses de billets que je lui tend, clins d’œil à l’appui, et malgré ce sourire ravageur qui a fait tant de victimes. Partons mes amis, fuyons cet endroit où l’amour de l’autre n’a pas cours.

Samedi 7 octobre, 19h

Comme l’aurait fait Christophe Colomb en y mettant à peine plus de classe – tant il est vrai qu’à l’époque, niveau fringues, ça en jetait quand même - nous posons enfin le pied au Chatelet. C’est en attendant les légitimes ovations que nous valent les heures passées sur la route que nous nous présentons triomphalement sur la terrasse où papotent déjà une quarantaine de joyeux convives.

Samedi 7 octobre, 19h35

Par hasard qu’il me marche sur le pied en reculant pour filmer un groupe de ses amis, Fabrice est le premier à noter ma présence. Il en profite pour me saluer dans de grands éclats de voix, avec force « salut la pute » et autres « qu’ès t’en dis tête de pine ? »  qui sont sa marque de fabrique. J’en profite pour recevoir ses hommages, saluer à la ronde et m’enquérir de l’ambiance. Les discussions battent leur plein. Je m’offre derechef un bon vieux verre de mousse blanche à la tireuse Heineken et m’en vais deviser avec certains camarades que je reconnais de droite et de gauche, en fumant des cigarettes avec un air viril pour me donner une contenance.

Samedi 7 octobre, 21 h

Tout le monde est maintenant déguisé. J’ai opté pour ma part pour un blouson en cuir, une perruque noire et des lunettes d’aviateur, qui me donnent l’air d’un de ces flics de choc si prisés pendant les années 80. « Los Angeles flics de choc », c’est d’ailleurs le nom que j’ai choisi in extremis pour la série dont je suis censé incarner le héros, Tucson. Avec Alexis, qui endosse le rôle de Mendoza, mon fidèle lieutenant, nous formons une paire de cops impitoyables très crédible. Tout le monde n’y voit que du feu, certains m’assurent même avoir gardé un souvenir très vivace de cette série mythique. Je ris sous cape. Force est de constater que j’ai quand même de loin le déguisement le plus à chier, à côté des JR et Sue Helen, Grominet, Averell Dalton, Maya les abeilles, Charles Ingalls, Albator ou même Stan, rayonnant dans son costume de l’incroyable Hulk. Mendoza et moi mettons un rapide « 10 à 0 » au babyfoot à Daktari et Sherlock Holmes. Ils nous embrassent le cul, ainsi qu’il est de bon ton de le faire dans ces circonstances.

Samedi 7 octobre, 22h

Une vodka de qualité est toujours appréciée, même en quantités.

Samedi 7 octobre, 23 h

Sans doute rassurées par la maturité que je dégage et l’air paternaliste que me confère mon blouson de cuir ainsi que par l’absence totale d’ambigüité qui règne dans notre conversation, deux jeunes femmes avec lesquelles je suis en train de papoter me confient leur intention d’avoir le soir même des relations sexuelles, avec n’importe qui semble-t-il, mais vite si c’était possible. Bref, elles me demandent visiblement de l’aide pour les guider dans leurs recherches. « Les célibataires ne sont pas légion dans la région », leur dis-je avec un petit rictus complice, goûtant avec fierté la qualité de mon jeu de mot (légion/région, bande de cons). N’ayant pas que ça à foutre de faire le boulot des autres, je m’éclipse pudiquement en prétextant astucieusement une envie de faire caca. Mais j’ai en réalité un second projet en tête : il est en effet temps pour moi de joindre aux mots de tous les convives une petite pensée affectueuse et bien tournée sur la nappe en papier que recevront nos superhéros de la soirée en accompagnement de leur cadeau. Des messages pour la postérité : une nappe qui sera sans doute encadrée et revisitée avec émotion par Antoine et Fabrice à chaque petit coup de blues.

Samedi 7 octobre, 23h15

Le cadeau est accueilli dans de grandes effusions de joie et le champagne sabré comme un vieux louveteau. Il était annoncé qu’il coulerait à flots. Dans un souci de rangement bien louable, Yann chiffonne la nappe (il est vrai gribouillée) et la jette dans la poubelle la plus proche.

Samedi 7 octobre, 00h40

L’atelier téquila itinérant mis en place par Marc-Antoine et aux commandes duquel j’officie bénéficie d’un vrai succés d’estime. L’occasion de revisiter les fondamentaux de cet art compliqué qu’est celui de l’élaboration d’une bonne téquila paf comme de sa bonne consommation : enchaîner les téquilas, l’art du bien respirer ; le cul-sec : mythe ou réalité ; le choix du verre adéquat ou la garantie d’un mélange homogène ; le sel, remède de grand-mère ou vraie révolution ?… et autant de sujets tant de fois débattus, mais sans cesse remis en question. Dans un souci de convivialité j’en bois seize et me sens bien, mais pas top.

Samedi 7 octobre, 1h50

La fête bat son plein. Dopé par la musique pop et les sunlights, je danse à en perdre l’équilibre. Le dancefloor est mien, disons les choses comme elles sont. Idée majeure s’il en est, voilà que les premiers déguisements s’échangent. Les pistes se brouillent. Je ne veux pas être en reste, et il ne sera pas dit que moi aussi je n’ai pas échangé mon déguisement. J’avise ma voisine. Quelques minutes plus tard, me voilà déguisé en la sœur de Stan : Robe à épaulettes taillée dans des étoffes d’une grande richesse, talons aiguilles à espérance de vie limitée, bas de soie, picanus en laiton massif très élégamment chantourné, boucles d’oreilles au look très actuel, je suis prêt à faire sensation. De leurs côtés, Carine est devenue Thomas Magnum, Charles Ingalls s’affiche maintenant sous les traits de Kojak, L’homme de l’Atlantide a choisi d’incarner Maya l’abeille en tout bien tout honneur.

Samedi 7 octobre, 1h57

Stan me traite de traînée.

Samedi 7 octobre, 2h50

Plus funky que jamais, rendu hystérique par les caresses de ma nouvelle robe sur mes cuisses musclées, je me déhanche en rythme sur des notes signées Gilbert Montagné. Par pure complicité, je m’autorise une tape amicale sur la fesse droite de Carine… Las ! elle vient justement d’échanger son costume de Magnum avec la fiancée d’Albator (lui-même ex-Grominet, ex-Wonderwoman, ex-Barracuda de l’Agence Tout Risques). Il dégaine son sabre. Je me réfugie aux toilettes.

Samedi 7 octobre, 2 h57

Qui n’a jamais galéré pour se soulager la vessie debout avec une robe me jette la première pierre.

Samedi 7 octobre, 3 h

Soucieux de récupérer mes habits d’origine, et ne souhaitant pas plus longtemps porter une robe mouillée, je décide de retourner voir ma collègue de déguisement qui choisit à son tour une tenue plus sportswear. Il est temps que je pense à me jeter quelques godets de trop dans le lampion. Je rejoins la terrasse pendant qu’au loin résonnent les premières chenilles. Le sol tremble, je suis prêt à jurer que le concours de galoches a lui aussi commencé. Ah, cette jeunesse ! C’est à peine une douzaine de verres plus tard que je choisis de m’éclipser discrètement. Des bonnes choses il faut savoir ne point abuser et le ciel m’est témoin qu’en dépit d’un physique encore très correct je n’ai plus vingt ans. Au revoir à vous tous ! Je pars me coucher comme une merde mais ne soyez pas tristes je serai là demain pour vous regarder ranger.

Samedi 7 octobre, 3h50

Je me couche dans ce grand lit froid, mais avec la satisfaction du devoir accompli. Que j’aime ces moments où le temps suspend son vol. Cette fête fut épique, grâce à nos hôtes, et j’ai déjà besoin de les remercier. Je les serrerai dans mes bras demain, c’est promis. Pour l’instant j’ai juste envie de repenser à tous ces bons moments, là, bien tranquille, sur mon lit, en fumant une dernière clope, bercé par la douce mélodie de l’alarme incendie.

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